mercredi 11 mars 2009

Fort Boyard s’exporte

Retour de vacances, retour de France. La France, c’était cher, mais la France, c’était bien.

Retour à Pékin, son faux soleil et son vrai froid, ses routes bordéliques, ses Chinois incompréhensibles, a-polis (ou malpolis, à voir).

Heureusement, pour m’éviter une crise nostalgique aigüe, mes amis les jônes m’ont préparé une petite activité bien de chez nous. Le jeu où tu passes ton temps à chercher des clés. Un petit Fort Boyard improvisé en somme.

Arrivée au bâtiment 21 (élèves étranger), rdc, réception (qui sert essentiellement de filtre pour ficher les non-résidents qui viennent rendre visite pour qu’on puisse aller les chercher après 23h, s’ils ne sont pas sortis) :
(traduction approximative) :
- Bonjour
- Bonjour, tu es Frédéric*
- Hein ??
- Non, lui c’est Antoine*.
- Oui c’est ça, je suis Antoine A.
- Ah, et bien il faut aller chercher la clé.
- Quelle clé ? Pourquoi ?
- Parce qu’on a changé votre serrure. Il faut une nouvelle clé.
- Et pourquoi on a changé ma serrure ?
- Je ne sais pas. Il faut demander au bâtiment 18, là où vous devez aller chercher la clé.
- Bien…

(* les noms ont été modifiés par souci d’anonymat)

Forcément, ça ne pouvait pas bien se passer. Les Chinois, vus qu’ils sont toujours en sureffectif, ils se font chier, du coup ils inventent des jeux pour passer le temps (changer les serrures des étudiants absent plus de 10jours). Et comme ils sont gentils (malpolis mais plein d’hospitalité les Chinois), ils font participer les étrangers.

Arrivée au bâtiment 18, 1er étage :
- Bonjour, voilà mon passeport, je viens chercher ma nouvelle clé.

Photocopie du passeport et établissement d’un nouveau papier jaune dupliqué deux fois de permis de résidence plus tard, on me remet la clé.

Retour bâtiment 21, 9ème étage, couloir, devant la chambre 927. La clé ne rentre pas dans la serrure. Chouette, le jeu continue.

Même bâtiment, rez-de-chaussée, réception :
- La clé n’est pas bonne.
- Ah bon, vous êtes sûr ? Attendez, on va regarder.

Là, la réceptionniste sort le trousseau de 150 clés qu’elle a pour que les femmes de ménage puissent rentrer dans les chambres (bizarrement ils n’ont pas encore pensé au ‘’passe’’ : contraction de 150 clés en une seule). Comparaison avec celle de ma chambre :
-Ah oui, en effet ce n’est pas la même.
Un coup de téléphone plus tard :
- Vous pouvez monter et on vous ramènera la bonne clé bientôt.
- Soit.

Je monte. Une heure plus tard je redescends pour sortir. Réception :
- On n’a toujours pas votre clé, on va monter fermer votre chambre.
- Soit.

Retour au bâtiment 19. Réception :
- On n’a toujours pas votre clé, on va monter ouvrir votre chambre.

Pendant un jour et demi, j’ai du prévenir quand je sortais, quand je rentrais pour qu’on ferme et ouvre ma chambre. C’était génial. En plus je ne me suis pas affolé, et j’ai fini quand même par remporter la clé ! C’est pas passe-partout qui me l’a donné mais son homologue chinoise à moustache.

Je n’ai toujours pas trouvé les boyards et je ne sais pas pourquoi on a changé ma serrure, mais je me suis diablement amusé…

lundi 17 novembre 2008

L’Eldorado chinois

(si tu es au CP, ce post ne t’intéressera pas. Vas aider le dragon à manger des vitamines ici )

Comme Arnaud le présente si bien dans son post : avec deux points on fait dire n’importe quoi à n’importe qui. Avec deux points, tout ‘’a’’ une croissance exponentielle. Et avec trois ?

La Chine c’est dingue. Rien n’est cher.

Je vois venir les protestations : « Rien n’est cher, certes, mais la fiabilité et l’authenticité des produits manufacturés laissent souvent à désirer, sans compter qu’on trouve difficilement des chaussures en 45 ». Autrement dit, « les produits chinois, c’est de la merde (et y’a pas de 45) ». Waouw waouw waouw ! Hey, je ne peux pas laisser dire ça sans au moins … approuver. Ok, c’est vrai, et j’aurai certainement l’occasion d’en apporter l’épreuve (les preuves) plus tard, le 45 ne court pas les rues, et les vêtements ne sont pas d’une qualité remarquable. Mais même avec des produits pourris qui servent au plus un mois on s’en tire sacrément bien. Et si on ne s’en tient pas qu’aux produits manufacturés, on économise aussi énormément.

Par exemple, la nourriture ne coûte pas un rond :
- Bic Mac (Menu Best Of) à 1.7 euros
- Mc Flurry à 0.6 euros
- Bouteille de coca à 50 centimes d’euros…
et la nourriture chinoise ? Ca je ne sais pas. Mais ça doit être encore moins cher.

Les livres ne coutent pas un rond :
- manuel de chinois acheté en France : 25 euros (IBN 7-301-08744-6/4.1455)
- le même acheté en chine : 5 euros
- le même photocopié et assemblé en Chine au centre de photocopie de l’université : 3 euros (voir l’intéressant post de Julien à ce sujet )

Le réparateur de vélo ne coûte pas un rond :
installer un nouveau panier : 1euro (ok, je triche, le panier brille de mille feux, mais au bout de deux semaines la peinture commence à partir et en dessous c’est tout rouillé… mais c’est parce qu’ils recyclent les paniers, c’est bien, c’est écolo-responsable).

Les ne bars coûtent pas un rond (c’est mes amis qui me l’ont dit maman, je te jure) :
- Mojito : 2 euros
- White Russian : 2 euros
- Bière : 1 euro

Etcétéra…

Du coup, je me suis dit que ce serait intéressant de suivre de près mes dépenses pendant mon immersion chinoise. Alors j’ai trouvé un logiciel gratuit qui s’appelle Excel (en Chine les logiciels sont tous freeware) qui permet de faire ses comptes assez facilement et de faire des graphiques. Ce que j’ai fait avec ma balance d’aout, septembre et octobre, avec une projection pour les prochains mois (les courbes exponentielles étant bien trop compliquées pour moi, je me contente d’une tendance linéaire).






Et là je dis, faut pas avoir fait Polytechnique un bac + 10 pour se rendre compte que clairement, à partir de novembre, non seulement je ne dépense plus rien, mais en plus je commencerai à gagner du fric ! C’est vraiment fou la Chine, l’argent tombe du ciel…
ca doit être pour ça qu’ils sont si nombreux les chinois...

ps : si tu en as marre de faire manger des carottes au dragon, vas chasser les pigeons débiles ici (à partir du CM2)

pps : pardon.

mercredi 29 octobre 2008

Comment la Chine s’entraîne : Handball expérience numéro 1

Handball (d’après mon dictionnaire personnel « expériences vécues ») :

Prononcé hand-ball (à l’allemande). Sport qui se joue à la main, avec un ballon rond, à 7 joueurs (6 joueurs de champs et un gardien), du genre plutôt viril, moins bestial que le rugby, plus classe que le foot. En provenance des pays nordiques (donc froids), ce sport se pratique en salle, avec beaucoup de transpiration pour faire de belles glissades (vu à la télé) et avec de la "colle’’ (résine collante) pour que même les petites mains puissent jouer.

Je suis trop content, j’ai trouvé un groupe de Hand : une vingtaine de Chinois qui s’entrainent, me dit-on, deux fois par semaine à l’université. Je m’y rends donc ce samedi, pour la première fois, le cœur léger, curieux de connaître le niveau de ces outsiders qui, au basketball, sport roi, sport sacré, sport idolâtré en Chine, et au football, joué quand, après une heure à la recherche d’un panier libre, non décidément il n’y en a plus, il faut bien se rabattre sur autre chose, ont préféré le Handball. Qui sont-ils ces ambassadeurs chinois du sport européen par excellence, de l’esprit de fairplay (on ne discute pas avec l’arbitre au Handball), de la classe dans le jeu (non, on ne se cramponne pas la tronche au Handball) et de la beauté des exécutions (ailier, suspends ton vol, écrivait Lamartine) ? Mais oui, qui sont-ils ?

Suivant les indications qui m’ont été donnés, j’enfourche mon fidèle destrier et pédale à perdre haleine à travers les larges allées de l’université. Fidèle à l’itinéraire prescrit je descends vers le sud, tout azimut, ou presque, puis bifurque vers l’ouest jusqu’à la porte historique de Tsinghua, contourne le stade de foot et pénètre dans la contre allée. De mes yeux de lynx je balaie les alentours à la recherche du béni gymnase susceptible d’abriter les fameux handballeurs chinois. Point de gymnase en vue. Il y a bien ce vieux terrain de tennis, un peu délabré, engrillagé, et derrière lui un autre terrain un peu plus grand, avec des petits buts et des petits ballons ronds… et des gens qui driblent, qui courent, qui sautent, qui tirent et qui jouent au handball. Voilà donc le gymnase, sans toit, sans parquet, avec des feuilles et de la poussière !

Du coup mes handballeurs chinois jouent dehors (pas de terrain couvert à l’université), sans colle, avec des ballons assez sensiblement dégueulasses, pleins de poussières, souvent sous-gonflés, qui glissent comme pas possible, sur un terrain qui ne me permet d’exécuter la technique de phoque des sauts d’ailier, durement acquise aux cours des entrainements de l’X, qu’à la condition de me déchirer assez douloureusement le flanc et la face. Pour ce qui est des fautes, devant derrière de côté ou en l’air, on siffle tout pareil c’est moins compliqué.

On a joué pendant 3h (avec des pauses cigarettes pour ceux qui veulent, on n’est quand même pas des machines) ! J’ai hésité à partir ou à me laisser mourir mais la réputation de la France – que dis-je, de l’Europe handballistique- pesait, assez lourdement d’ailleurs, sur mes épaules…

Au moins j’aurai appris comment fait la Chine pour dominer les JO (au Hand pas tout à fait encore)… avec un entrainement pareil c’est simplement une question de sélection naturelle. Et vu qu’ils sont plutôt du genre nombreux, y’a un sacré potentiel…

jeudi 16 octobre 2008

Tsinghua ou l'heure universelle

Jadis, grand papi me racontait que l’heure, la vraie, celle qui est juste et qu’il faut suivre, c’était celle de la gare et des trains. Parce qu’arriver sur le quai 15 secondes après le coup de sifflet, ça a beau être pas beaucoup, au final, pas de train. Et qui dit pas de train dit souvent gros ennuis. Du coup, c’est vrai que c’est bien pratique d’être calé sur l’horloge de la SNCF.

Quand l’horloge atomique est arrivée (du moins que tout le monde a commencé à en parler sans savoir ce que c’était) on s’est dit que c’était carrément plus classe de se mettre à l’heure de l’horloge atomique et c’est vrai que c’est moins ringard que d’être à l’heure des trains. Et puis avec internet maintenant on se met à l’heure de l’horloge parlante sur http://www.horlogeparlante.com/. En fait y’en a pour tous les goûts : l’horloge astronomique, l’horloge interne, l’horloge biologique…

Mais à l’université de Tsinghua, Pékin, République populaire de Chine, tout ça ça n’existe pas. Oh, bien sûr, à Pékin il y a des trains (carrément différents des trains français d’ailleurs), et même des TGV, et bien sûr qu’arriver 15 secondes après le départ c’est aussi galère en Chine qu’en France (et certainement même plus). Mais faut bien dire qu’on ne prend pas le train tous les jours (sauf les contrôleurs et les conducteurs, mais pour eux c’est peut-être un peu différent), d’autant plus qu’en Chine c’est mission impossible pour choper des billets pendant les fêtes. L’horloge interne ou biologique, n’en parlons pas, les pratiques culinaires chinoises (piment à volonté, et même un peu en rab, agrémenté d'un peu de viande, parfois, et de racines de lotus) se chargent de dérégler tout ça. Impossible de suivre quoi que ce soit de ce côté-là. Du coup ici, on ne se met pas à l’heure des trains, ni à celle de l’horloge atomique, de l’horloge astronomique, de l’horloge interne, externe, indépendante, non non...


Ici l’horloge, c’est l’horloge de l’eau chaude. L’heure de l’eau chaude c’est plus juste, plus précis, plus efficace que toutes les autres. Une vraie tuerie. Et tout le monde suit l’horloge de l’eau chaude. Il s’agirait pas de se savonner tranquillement pour s’apercevoir que l’eau chaude vient juste d’être coupée, et de se retrouver comme un phoque sans flotte à devoir tout rincer à l’eau froide. Non, non, ça c’est pas drôle. Parce qu’ici ça rigole pas, c’est strict. Il y a des horaires d’eau chaude et tout le monde les respecte. Du coup tout le monde prend sa douche en même temps et la quantité de flotte chauffée qui part d’en bas et qui est divisée par tous les doucheurs arrive à mon 9ième étage avec un débit un peu dérisoire. Ca fait sûrement parti d’un grand programme de développement durable...

Au moins, pour la première fois de ma vie peut-être, l’horloge de mon ordi, de mon téléphone et de ma montre sont absolument synchros. Merci qui ?